jeudi 22 mai 2014

INTERVIEW CHANSON : CLEMENCE SAVELLI

Elle est jeune, talentueuse, a donné des centaines de concerts dans toute la France, plusieurs albums. Une partie du public l'encense, la suit avec fidélité depuis ses débuts et on le comprend. C'est à l'approche de son concert le 29 mai au Bateau Daphné que la chanteuse Clémence Savelli a bien accepté de répondre à quelques questions.



Clémence Savelli, la dernière fois que le public parisien vous a vue sur scène, c'était au forum Léo Ferré l'an dernier. Comment vous sentez-vous à l'approche de ce nouveau spectacle le 29 mai à l'occasion de la sortie de votre nouvel album ?
En réalité, j'ai donné plusieurs concerts à Paris depuis celui du Forum Ferré, à l'Angora en mars, et tout récemment à l'Entrepôt dans le cadre des 15 ans de la Revue de sociologie "Travail, genre et société". Je me sens bien à l'approche de ce concert. Je suis une habituée des péniches et j'aurais la chance d'être accompagnée par trois musiciens fabuleux (Pascal Pistone au piano, Marjolaine Cambon au violoncelle, et Régis Prudhomme à la contrebasse).

Pourquoi 'Le coeur comme une bombe '?
C'est à la base le titre d'une des chansons du spectacle. C'est une chanson où tout un chacun peut se retrouver. C'est l'histoire d'un employé à bout qui n'en peut plus, et qui rêve la nuit de casser la gueule au petit sous-chef qui le harcèle au quotidien. Ce "p'tit sous-chef" auquel fait allusion la chanson, ce peut être tout aussi bien le mari, qui méprise sa femme au quotidien. C'est vraiment l'idée du coeur au bord de l'explosion.

Comment construisez vous un tour de chant ?
A dire vrai, j'écris les chansons de manière tout à fait spontanée, compulsive, émotionnelle. Puis quand j'ai une quinzaine de nouveaux titres et qu'il s'agit de construire le spectacle, je cherche un fil conducteur. C'est plutôt d'ailleurs Pascal Pistone qui m'aide à créer un lien entre les chansons. Il se trouve que la majeure partie des nouvelles chansons parlaient de femmes. Moi j'ai toujours l'angoisse que cela soit réducteur comme grille de lecture par la suite, mais il se trouve que le public semble bien accrocher à ce fil conducteur d'une femme à travers les âges. 

Que signifie pour vous être une femme qui chante en 2014 ?
Je ne sais pas trop ce que veut dire "être une femme" en définitive. Je ne pense pas en tant que femme. Je pense, j'observe, je ressens, puis j'écris. Je pense malheureusement qu'on a souvent tendance à attendre des femmes qui chantent qu'elles le fassent toujours avec douceur, "féminité" et tout le tralala, et qu'il est plus difficile d'arriver sur une scène en faisant un peu l'inverse. Quand j'entends parfois qu'il est dommage, avec une "si jolie voix" et un "minois si gentil", de "s'énerver comme ça", cela me fait beaucoup rire maintenant. En d'autres termes, c'est soit belle, conne et tais-toi. Non merci !


http://www.vivaarte.fr/clemence/ [Site officie]


CLEMENCE SAVELLI EN CONCERT 29 MAI - PARIS [EVENEMENT]


dimanche 18 mai 2014

Interview avec la chanteuse Pascale Locquin



Interview avec la chanteuse Pascale Locquin
Lundi 12 mai 2014, Paris.


Pascale Locquin a arpenté les cabarets de Paris et d'ailleurs en France dès 1985. En 1995 sortait son album 'Attention...pas...Sage !' Chanteuse de scène, au répertoire décalé, ciselé, évoquant aussi bien Colette Magny que Catherine Le Forestier, l'auteure de 'C'est tout lune' inaugurera en 2015 trente années de vie musicale, hors des sentiers battus. Echanges avec la chanteuse, ancienne handballeuse (encore maintenant, elle tient à son footing régulier), à l'approche de son concert au mythique cabaret Le Magique, le 24 mai.

***

Bonjour Pascale, il y a quelque chose qui me fascine dans ton parcours, comment passe t-on du sport à la chanson ?

Le sport et la chanson, c'est un peu lié. Quand j'étais adolescente, je me disais que je ferai du sport d'abord et que je chanterai après (rires). Depuis toute petite, j'aime chanter et j'aime le sport, c'est une école de la vie pour moi. J'ai toujours été quelqu'un de très physique. J'ai fait de l'athlétisme 800 mètres, j'ai été championne régionale d'espoir Champagnes-Ardennes. J'ai fait presque toutes mes études à Troyes. Au lycée, j'avais une guitare...

J'étais de 1979 à 1982 dans l'un des plus grands clubs de handball féminin. Gardien de but. A Troyes j'ai connu Jean-Marie Bigard, ailier de l'équipe Handball masculine, son frère Jean-Pierre était gardien de but. C'était une grande période, on faisait la fête, tout ça, le monde du sport est un peu protégé, c'est aussi une école de la Vie. Après Troyes, je suis partie à Paris jouer à l'ASPTT (Association Sportive des P.T.T).

A quel moment tu as quitté ce monde-là ?

33 ans. J'ai arrêté à 33 ans. La chanson, le sport, ce sont deux passions que je voulais mener à bien. J'ai commencé à chanter dans les restauants, les petites salles de spectacles.

Dans ton parcours, ta rencontre avec la chanteuse Catherine Le Forestier a été déterminante, semble t-il, tu lui a même dédié la chanson 'Femme pas très faux cils'...

Je suis allée voir Catherine Le Forestier à son spectacle, à Paris, c'était en 1984. Je suis allée la voir après, j'ai discuté avec elle. Cela m'a permis de faire le point, de savoir pourquoi je chante, comment on construit un spectacle, etc. Il faut dire qu'elle sortait des sentiers battues.

Et tu t'es vraiment lançée...

Oui, je me suis retrouvée dans pas mal de festivals, parfois sans m'y attendre. Par exemple le fameux festival d'Artigues, qui n'existe plus, mais qui était très important dans le milieu chanson...

Un peu comme le festival de Barjac maintenant ?

On peut le dire, oui. Le public pouvait être très dur. Moi j'y ai chanté. Il y avait Gilbert Lafaille dans le public. Les festivals, oui...c'est important...après si tu n'as pas de structure derrière toi, c'est difficile. Je suis toute seule avec ma guitare, mon téléphone, mon stylo. Je n'ai jamais eu de label.

Qu'est-ce que signifie chanter pour toi, justement ?

L'acte de chanter, c'est la transmission d'une émotion, à travers les notes, les musiques. C'est se mettre à nu. Un jeu narcissique, même quand on ne parle pas de soi directement. Faut être un peu égocentrique pour monter sur scène, je n'échappe pas à la règle. (rires).

Et l'inspiration, comment vient-elle ?

J'écris quand je sais que j'ai quelque chose à dire. Si j'ai rien à dire, je préfère me taire. Et quand j'écris, c'est pratiquement d'une seule traite.

Ton premier album est sorti en 1995...

Oui. Je me suis dit 'Pascale, si tu fais pas de disque avant 40 ans, t'arrêtes tout !' (rires). J'ai eu l'occasion de le faire. Le titre Attention pas...sage ! C'était un clin d'oeil à celles et ceux qui disaient que j'étais un pitre.

Dans ton répertoire, quelles sont les chansons qui, tu penses, marquent les gens ?

Femme pas très faux cils...C'est pas Christ. C'est tout lune. Oui, on peut dire que les gens qui viennent me voir en spectacle sont marqués par ces chansons.

Et toi, personnellement s'il y a une chanson que tu devais emmener sur une île déserte ?

Je les aime toutes. Je prendrais mon recueil.(rires) Dans mon répertoire, je dois avoir...300 chansons...sur scène, j'en ai déjà chantées les trois quart. Ce sont des chansons précieuses, des tranches de vie auxquelles je tiens.

Il y a une chose...plus intime, je dirais, dont je voulais un peu parler, tu es une femme qui aime les femmes, est-ce quelque chose que tu as abordé dans tes chansons ?

Oui. N'hosto ou tard. Chantée sur scène. Elle fait référence à une relation amoureuse entre deux femmes, une médecin et sa patiente.

Et justement, quel regard as-tu posé sur les manifestations contre le mariage pour tous ?

Je ne veux pas être cataloguée chanteuse homosexuelle, même si j'ai chantée dans des soirées homos. Je ne veux pas rester coincée là-dedans. Mais ceux qui défilent contre le mariage pour tous...c'est la haine, c'est...l'horreur...ces gens ne m'inspirent pas. Je n'ai pas envie de parler d'eux. Ce serait gaspiller de la salive. Il y a d'autres combats à mener.

Je comprends. Des combats...et des projets, côté projets, qu'envisages-tu ?

J'ai écrit un projet culturel et sportif, j'aimerais qu'il y ait quelque chose qui se passe. Je chante le 24 mai au Magique. J'espère enregistrer un disque bientôt.

Comment as-tu découvert le Magique ?

A l'occasion d'une soirée que donnait la chanteuse Nathalie Solence et le guitariste Claude Gaisne. Ils invitaient des artistes dans le cadre d'une scène ouverte. Marc Havet (n.b : chanteur et patron du Magique) m'a proposé de venir y chanter par la suite. Et maintenant depuis 3 ans, chaque année j'y chante.

Et ils seront nombreux, je le souhaite, le 24 mai à t'applaudir. Merci, Pascale Locquin pour cette interview.

Merci à toi.

***

Dehors il pleuvait, il ventait. Nous avons continué à papoter de choses plus informelles. Chanteuse qui écrit ses textes et ses musiques, Pascale Locquin aime l'humour, n'aime pas trop les voyages (si ce n'est les voyages intérieurs), mais apprécie la Bretagne, la région du Sud-Ouest. Elle aime la cuisine du terroir. Musicalement, elle peut être éclectique, adore Véronique Pestel, Anne Sylvestre, Catherine Le Forestier, apprécie beaucoup Maxime Le Forestier, Michèle Bernard, Catherine Lara, Serge Reggianni, Allain Leprest, Louis Capart, dans les jeunes générations, aime bien Agnès Bihl, Virginie Seghers, Jann Halexander, Indila.

Pascale Locquin, c'est une voix reconnaissable, inimitable et chacun de ses concerts sont l'assurance d'un beau moment de complicité, de chaleur, comme quand on retrouve une amie avec qui parler de tout, du temps qui passe, bref, de nos vies.

En concert le 24 mai, au Magique, 42 rue de Gergovie, 75 014 Paris. Métro Pernety, ligne 13. http://www.aumagique.com

En attendant le nouvel album, le premier album sera bientôt disponible sur toutes les plates-formes de téléchargement légal.

Chansons sur disque à ce jour :
C'est pas Christ
C'est tout lune
Duchesse y penser
Enterrons le H de guerre
Femme pas très faux cils
Les 3 grâces
Les sens de la vie
Medic'amant
Mediocre cite
Mouche à chaud
Naissance d'un cri
Temps regretemps



C.D.M


Bertrand Ferrier chante 'Nanterre'


Nicolas Duclos chante 'L'Envers-Vie'


Vincent Ahn


Clémence Savelli chante 'Novembre'


L'Ombre Leprest en 2014 [par le chanteur Jann Halexander]



L'Ombre Leprest en 2014 [par le chanteur Jann Halexander]


Que signifie Allain Leprest pour les générations actuelles de jeunes chanteurs, chanteuses qui 'errent' dans le métier ? J'ai le sentiment qu'il y a deux façons d'appréhender cet artiste : l'ignorer purement et simplement. Soit se pencher sur son parcours, sur sa pensée, son rapport au monde, aux gens, à la culture, à l'argent, au temps, au succès, au non-succès.

C'est important d'en parler car s'il y a un style Leprest – phrasé, choix des mots, posture scénique- il y a aussi une pensée Leprest. Pour en avoir discuté avec des collègues nés dans les années 80, comme moi, cette pensée nous a permis, permet encore de servir de balise, peut-être même de bouée. Il n'y avait rien d'héroïque dans son détachement par rapport au vacarme médiatique, aux injonctions de l'applaudimètre et autres bling-bling du show-biz. Il était ainsi, détaché de tout cela mais investi par ce qu'il chantait. Il n'aurait rien pu faire d'autre, même au fond d'un gouffre. Je ne sais pas si son répertoire est intemporel, et là n'est peut-être pas la question, peut-être que dans quelques années, on dira que ses chansons ont mal vieilli, c'est une possibilité. Mais il y a une ombre Leprest qui plane sur la chanson. Cette ombre n'est ni écrasante ni bienveillante, elle est là, tout simplement.

J'ai donné quelques cours de chant et je me suis retrouvé également dans une drôle de position face à des débutants qui voulaient des conseils sur comment devenir chanteur, que faire pour construire son chemin. Quand c'est comme ça, je leur dis de s'intéresser à Allain Leprest et Anne Sylvestre. Après peut-être il leur sera plus facile de savoir ce qu'ils veulent, ils choisiront leur 'camp' en connaissance de cause. Mais au moins qu'ils voient qu'il est tout à fait possible de durer à l'écart des top 50, des charts, des tapis rouges, des télés, de l'univers people. Libre à eux de préférer les paillettes, ce n'est certainement pas moi qui vais juger cette attitude.

Rien ne me parlait chez Allain Leprest pendant longtemps. J'ai failli passer à côté. Dans la communauté LGBT* dont je fais aussi partie, une communauté qui a sa propre culture, variée, jugée parfois hermétique, mais en tout cas identifiable, son nom ne parle pas à la plupart des gens qui aiment la chanson française. Guidoni, Barbara, oui, lui, non, rien. C'est un chanteur, point barre. Je suis incapable de m'identifier aux personnages de ses chansons, je n'arrive pas à saisir son désespoir écorché. Je l'ai vu sur scène, grâce à un ami qui a insisté. Qu'on aime ou pas, il se passait quelque chose, c'était troublant. J'ai vu un franc-tireur de la chanson. C'est ce qui m'a plu. Sa vie, flamboyante, est celle d'un franc-tireur, amoureux des mots, des notes, sources de transcendance.

Sa mort m'a fait un choc. Mais elle a aussi suscité plus que jamais en d'autres artistes et moi, le besoin, fou, réel, de non pas reprendre le flambeau, mais de montrer que crise, pas crise, médiatisation ou pas, succès ou échec, il était possible de continuer son chemin, faire sa route de chanteur. Il n'y a pas de mode d'emploi du bon chanteur, toutefois il y a des destinées qui doivent nous faire réfléchir, afin de mieux savourer le présent et avoir un peu moins peur de l'avenir. La destinée Leprest invite au détachement.



Auteur, compositeur, interprète, comédien réalisateur, Jann Halexander chante depuis 2003 en France, Belgique et en Allemagne. Né le 13 septembre 1982 à Libreville (Gabon), l’artiste franco-gabonais, pianiste, petit-neveu du chanteur gabonais folk Pierre Akendengué, compte quelque chansons-clés à son actif : 'A Table, 'Il est minuit Docteur Schweitzer', 'Aucune Importance'. Essentiellement artiste de scène – il a fêté ses 10 ans de carrière à l'Auguste Théâtre, Paris en 2013- il a sorti de nombreux albums et de films expérimentaux et ses œuvres chantées ou filmées sont cités dans des ouvrages universitaires. Son dernier album, 'Un bon chanteur est un chanteur mort' aborde la condition de l'artiste et évoque en filigrane la figure de Leprest, parmi d'autres artistes, méconnus et disparus trop tôt.



*LGBT : Lesbienne – Gay- Bisexuel(le) – Transexuel(le).

Michael Bond in french s'il vous plaît. Just french.

  Reconnaissons une qualité à Florian Philippot (au moins une) : c'est d'avoir permis au chanteur Michael Bond de monter sur la scè...